Dessin et couleurs : Paul Frichet
Date de sortie : janvier 2013
Editeur : Soleil Productions
46 pages
genre : aventure fantastique, conte
Si vous avez raté le tome 1 de ce triptyque, je vais tenter de vous en faire un petit résumé.
Stéphane Betbeder y pose les bases d’un conte et d’une « mythologie du Pôle Nord » en montrant l’origine de la création de l’Inlandsis. Tout démarre avec l’expédition en 1909 de Robert Peary qui tente de conquérir le pôle Nord. L’ethnologue Mauss fait parti de l’expédition et veut recueillir le témoignage d’une vieille femme Inuit mourante qu’il avait vu deux ans auparavant. Elle lui raconte alors la légende de l’Inlandsis, dernière terre inexplorée créée par des dieux bannis pour se protéger autant des hommes que des enfants de leurs sœurs. Ces dernières également bannies par les leurs, ont été rejetées par les hommes. Si les hommes foulent cette terre, l’ancien monde des dieux disparaîtra pour laisser place à l’orgueil et à la soif de pouvoir des hommes sur la nature.
Dans le tome 2, Peary pense avoir découvert le pôle Nord. En fait, un des dieux déchu a usé de magie pour faire mentir les instruments de mesure afin d’éloigner l’expédition d’Inlandsis. La vieille Inuit réchappée des sorts jetés par les dieux, continue quant à elle son récit sur les enfants d’Inlandsis. Traqués par les hommes et les dieux, ils sont élevés et protégés par une meute de loups pour l’une et par un groupe d’ours pour l’autre.
On sait aujourd’hui que Peary n’aurait qu’approché le pôle sans jamais l’atteindre et l’astuce employée par l’auteur pour étayer ce fait historique est assez amusante. Avec l’opposition des hommes et des dieux, du nouveau monde à l’ancien, le schéma de la mythologie est somme toute assez classique. Sauf qu’ici l’auteur imbrique habilement deux époques montrant le déclin de l’ancien monde. D’une part au XXème siècle avec l’expédition de Peary dont seule la gloire de l’exploit semble lui importer, et d’autre part à l’époque des vikings qui seraient les premiers hommes à avoir foulé les glaces du nord.
Malgré l’imbrication de plusieurs récits et époques, la lecture reste très fluide et très limpide et l’on est vite pris par ce conte où se côtoient le pragmatisme et la magie. Comme dans tout bon conte qui se respecte, la violence est présente et est traitée ici sans concession tant d’un point de vue graphique que scénaristique. Le ton est cependant un peu allégé grâce à la touche d’humour que l’auteur s’est permis de glisser dans certains dialogues ainsi que dans le caractère du personnage du dieu déchu chargé d’empêcher la progression des hommes. Ronchon, râleur et renfrogné, ce personnage ne paye vraiment pas de mine et s’éloigne des stéréotypes propres aux contes où les dieux ont en général plus de prestance et de charisme. C’est ce qui donne un brin d’originalité à cette histoire assez classique.
Paul Frichet sert cette histoire magnifiquement avec un graphisme fin et subtil, accompagné d’une palette de couleurs assez variée et inhabituelle dans le traitement des espaces glacés. Des tons les plus clairs aux plus sombres, toutes les couleurs y passent évitant ainsi la monotonie des tonalités blanc bleutées inhérentes à ce genre de décors. Cela renforce par ailleurs le côté légendaire du récit.
Au-delà du conte où se côtoient merveilleux, magie, animaux doués de paroles, Inlandsis dénonce de façon plutôt originale le thème assez conventionnel de la confrontation entre la soif de pouvoir et de conquête par certains hommes, et le respect de la nature et des traditions par d’autres.
Allez hop ! Une bonne doudoune, et tous à Inlandsis ! Je laisse le soin à chacun de choisir son camp …
Ma note : 8/10
Loubrun
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