Scénario et dessin : Etienne Davodeau
Editeur : Futuropolis / éditions du Louvre
date de sortie : octobre 2013
144 pages
Pour les beaux yeux de Mona
Mathilde et Fabien sont ensembles depuis quelques temps lorsqu’un beau jour Mathilde décide de présenter son ami à sa famille. Voilà donc le gars Fabien qui se retrouve en pleine campagne au milieu du clan Benion, entouré du père, des deux frères et du grand père de Mathilde. Pour Fabien, la rencontre avec sa belle famille va être des plus singulières et son statut d’agent de surveillance au musée du Louvre sera curieusement mis à contribution. De gardien de salle, il sera promu Expert en art et se verra confier une mission de la plus haute importance pour le clan Benion.
Une vieille toile familiale est ressortie du grenier et l’avis de « l’expert » est alors requis. Que vaut ce tableau, représentant un chien qui louche, peint au XIXème siècle par un aïeul ? Est-ce une croûte, ou mérite-t-il le statut de chef d’œuvre, au quel cas il pourrait bien avoir sa place au Louvre.
Fabien ne mesure pas tout de suite le sérieux de la requête des Benion, jusqu’au jour où il voit débarquer sur son lieu de travail les deux frères qui s’enquièrent de l’avancement de l’affaire.
A travers cette fable cocasse, Etienne Davodeau nous dévoile un peu des coulisses du Louvre en révélant le métier de gardien de musée, mais surtout il nous invite à une réflexion sur la valeur des œuvres d’art. Qu’est-ce qui fait qu’un tableau à plus de valeur artistique qu’un autre ? Comment une œuvre se retrouve-t-elle accrochée au mur d’un musée ? Qui décide de la mettre en valeur ou de la laisser dans une cave ou un grenier ? Et pourquoi ces milliers de peintres anonymes spécialistes des couchers de soleil criards et des natures mortes trop mortes, n’auraient-ils pas le droit de voir leur travail exposé dans un musée ?
Si l’Art est une chose souvent traitée avec sérieux et parfois avec condescendance, Davodeau opte ici pour un ton léger et fantaisiste permettant de prendre un peu de recul par rapport à la vraie valeur que l’on veut bien donner aux œuvres exposées. Ainsi, la Joconde, vue par 90% des visiteurs du Louvre et photographiée des milliers de fois tous les jours, a-t-elle aux yeux de la famille Benion vraiment plus de valeur que ce Chien qui louche peint par un aïeul ? N’en déplaise aux spécialistes, la question est légitime, et Etienne Davodeau ose la poser et y répondre en inventant un obscur et néanmoins drolatique groupe – La République du Louvre – chargé d’étudier l’entrée des œuvres dans le musée. Il réussit ainsi à opposer gentiment et avec beaucoup d’humour les propos parfois sibyllins des professionnels de l’art au bon sens et à la simplicité du terroir.
Comme dans les Ignorants, Davodeau excelle dans la narration nourrie de dialogues simples, fluides et truculents à la fois. On entend littéralement parler les protagonistes et l’on arrive à s’immiscer dans l’histoire tant les personnages, mêmes les plus farfelus, font vrais.
Coédité par le musée du Louvre, les pendules sont remises à l’heure à la fin du livre par une description du dispositif d’acquisition des œuvres du musée. La réalité est malheureusement ou heureusement – libre à chacun de choisir son camp – beaucoup moins fantasque que la version proposée par Etienne Davodeau.
Ma note : 8/10
Loubrun
Au fait, pour la Joconde, c’est là → Aile Denon – 1er étage – Salle 6 – Salle de la Joconde.
Commentaires récents