Enfant de la nuit polaire

Scénario : Julia Nikitina
Dessin : Julia Nikitina
Éditeur : La Boîte à Bulles
Date de sortie : 1er février 2023
154 pages
Genre : Récit autobiographique

« Le monde est plus vaste que les rayonnages d’une bibliothèque. »

Présentation de l’éditeur

Julia Nikitina a grandi à Salekhard, dans le Nord de la Russie. Toute son enfance, elle l’a vécue au rythme de cette terre arctique, de ses saisons contrastées, et du fleuve Ob.

À seize ans, pourtant, elle quitte sa ville natale pour Tioumen afin d’y étudier le dessin. L’adaptation à la grande ville est difficile : elle souffre d’agoraphobie, il lui faut faire ses preuves et les doutes l’assaillent. D’autant que son passé se rappelle sans cesse à elle, lui chuchote que sa place n’est pas au milieu des immeubles et des allées goudronnées.

Malgré tout, Julia s’obstine et part, un peu plus tard, pour Saint-Pétersbourg afin d’y poursuivre ses études. Elle veut désormais voir le monde, mettre des kilomètres entre elle et cette terre natale qui n’a en fait rien à lui offrir. Au fil des voyages, pourtant, elle renoue avec ses origines et, petit à petit, comprend : elle porte le Grand Nord en elle.

Mon avis

L’histoire de cette BD est très personnelle. On retrouve cette intimité dans les mots mais aussi dans les dessins. Le récit est autobiographique, l’auteure partageant celui de sa mère puis le sien. Le parcours de chacun de ces deux personnages féminins est lié à cette terre isolée de Sibérie : une terre hostile, glaciale et abandonnée mais qui est celle où l’héroïne a grandi avec sa mère.

Enfant de la nuit polaire parle du lien de la dessinatrice avec celle-ci, à la fois rassurant et sclérosant. Sa mère l’a élevée seule, les conditions de vie, les températures glaciales les rapprochant naturellement, apportant un réconfort et une chaleur qui les mettent à l’abri l’une et l’autre du monde extérieur. On la voit grandir, avec une symbolique des plus expressives, dans le ventre de sa mère, jusqu’à ses 16 ans.

L’adolescence est donc là, Julia voulant prendre son envol pour faire des études de dessin. L’auteure évoque alors sa difficulté à changer complètement d’univers et à se construire loin de sa mère avec qui elle a vécu si longtemps dans un isolement géographique et social qui ne sera pas sans conséquences. Sa mère est un témoin lointain de la tentative d’émancipation de sa fille, lui rappelant d’ailleurs combien elle était en sécurité auprès d’elle.

C’est graphiquement qu’Enfant de la nuit polaire est remarquable, et c’est dans une interview présente en fin d’ouvrage que Julia Nikitina confirme qu’elle utilise des techniques d’estampage pour créer des bandes dessinées qui ont peu d’exposition médiatique en Russie. L’obscurité domine à travers un noir profond qui évoque des conditions de vie et un environnement âpres. Étrangement, le blanc de la neige et de la glace n’a pas vraiment sa place. Le verglas, les vents froids prennent des formes végétales, comme des tissus traditionnels, ou des gravures soignées, montrant combien les influences culturelles de la dessinatrice sont marquées. Son trait est épais et ses planches sont travaillées mais finalement peu détaillées.

Le scénario prévaut avant tout par son authenticité. J’ai eu parfois l’impression de lire un récit illustré plus qu’une roman graphique tant la « patte » de Julia Nikitina est singulière, ses évasions allégoriques poussant à une lecture plus contemplative que sémantique.
Petitgolem13

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