Auteur : Fabrice Neaud
Éditeur : Delcourt
200 pages
Date de sortie : 13 avril 2022
Genre : biographie
« Je sais pourquoi je te prends en photo. Je nous invente l’album souvenirs que nous ne feuilletterons jamais. Je t’observe aujourd’hui dans une mire qui te projette déjà vers le passé. Je te transforme en ce frère que tu n’as jamais été, en cet amant que tu n’es déjà plus. Je fixe ces moments où tu me souris encore puisqu’il faudra bien te le dire un jour ! Et qu’un autre jour, las de l’entendre, tu ne souriras plus. Et alors là, qu’adviendra-t-il de moi ? »
Présentation de l’éditeur :
L’amour, la création, l’homophobie, la précarité, dans la France des années quatre-vingt-dix. Réédition enrichie du premier volume de la plus grande œuvre autobiographique de la bande dessinée française.
Avec un ami, Fabrice commence à peindre pour une église locale. Il tombe amoureux d’un jeune conscrit. Celui-ci devient son modèle dans un amour à sens unique. Rencontres d’un soir dans le parc local, relations codifiées des bars gays et précarité sociale se nourrissent les unes les autres pour empêcher toute possibilité d’épanouissement.
Mon avis :
« Les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon cœur d’une langueur monotone. » Chanson d’Automne, de Paul Verlaine. Voilà ma première pensée à la fin de ces 200 pages. Une impression de m’être immiscée dans la vie et les pensées de Fabrice Neaud qui nous dévoile, avec pudeur mais sans rien omettre, sa vie de dessinateur, diplômé des Beaux-Arts, chômeur et homosexuel.
L’aventure de ce journal, actuellement en 4 parties (dont les deux premières sont réunies dans ce tome), a débuté dans les années 90 quand l’idée lui a été proposé de faire son journal en BD plutôt que des œuvres de Science-Fiction. Pourquoi pas après tout. À l’époque, être gay n’est pas ce qui se dévoile le plus dans l’art et sa vie d’auteur vaut bien celle d’un autre.
Alors on le suit dans le fameux parc de la région où les homosexuels se rencontrent pour un moment fugace de jouissance. On l’accompagne dans un bar où ne peuvent entrer que les homosexuels afin d’éviter les regards curieux des hétéros qui viendraient comme on va au zoo. Puis on le soutient dans son amour à sens unique avec Stéphane. Ce soldat à la carrure imposante, le regard d’un chien battu et toute la virilité qui attire Fabrice. Sans oublier ses déboires professionnels.
« Mes amis, mes amours, mes emmerdes » de Charles Aznavour. Autre pensée en lisant ces deux premiers journaux. Au centre, Stéphane l’inaccessible. Son modèle pour un contrat de travail, son amour impossible dans l’obscurité de ses nuits, de ses rêves et de ses fantasmes. Un sentiment qui poussera Fabrice à devenir, presque, un stalker… suivant son aimé dans les remparts où les homosexuels se cherchent pour un coup d’un soir, lui envoyant des lettres à la volée et s’envoyant en l’air avec les amants de celui qu’il n’aura jamais…
Sacrée biographie qui s’étale non seulement sur plusieurs tomes – du jamais vu, en tout cas pour moi – mais également des années. Un dessin réaliste qui n’empêche pas l’artiste de jouer sur les impressions, les changements de styles pour flouter un visage, rendre inaccessible quelqu’un ou quelque-chose par la magie de la nuance et du trait en noir et blanc. Reste à savoir si on va aimer ou non. C’est une biographie. Mais Fabrice Neaud, ce n’est pas un grand aventurier : c’est un homme avec ses peurs et ses aspirations. C’est un peu Monsieur Tout-le-Monde. Donc mon avis n’en sera qu’un parmi d’autres, sans prétention de vous dire si c’est bien ou pas…
ShayHlyn.
Quand je lis cette chronique, je me dis que ça risque de n’intéresser qu’une toute petite partie de personnes non ?
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Je pense aussi. Les amateurs de l’auteur sans nul doute, et puis artistiquement par son style et l’importance de l’œuvre: c’est pas courant une si longue bio relevant du journal intime.
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J’avais essayé de lire le 1er tome à sa sortie, séduit par le graphisme élégant, mais je n’en garde aucun souvenir n’ayant pas été séduit par le propos…
Sinon, c’est une belle chronique !👍
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