Zone Critique

Scénariste : Bruno Latour
Dessinateur : Philippe Squarzoni
Editeur : Delcourt
Genre : Documentaire, écologie
Sortie : le 9 octobre 2024

Avis de l’éditeur :

Dans Zone critique, Philippe Squarzoni fait dialoguer Où suis-je ? et Où atterrir ? , deux ouvrages de Bruno Latour, sociologue, anthropologue, considéré comme le « philosophe français le plus célèbre au monde » par le New York Times. Entamé avec Bruno Latour, qui nous a quittés en 2022, cet essai graphique est l’occasion de questionner l’ampleur de la catastrophe provoquée par le Nouveau Régime Climatique.

Mon avis :

Voici pour le moins un album étrange loin des zones cartésiennes fort connues. Bruno Latour & Philippe Squarzoni affichent clairement leur intention tant scénaristiquement que sur le pan graphique de nous offrir un lecture loin des sentiers battus.

Un scénario ambigu qui démarre sa narration pointant une femme tapie dans l’ombre d’une chambre, un masque lui recouvrant la bouche et les narines comme lors de la pandémie. Celle-ci se questionne sur son état d’être et semble s’orienter vers un décryptage de tous les éléments externes : le vent qui balaye un feuillage, une pluie arrogante qui crispe les fenêtres de son impact, une lumière qui va de pair avec le réchauffement climatique. Tout porte à croire que chaque chose se veut être un profond fardeau impitoyable bercé d’une mélancolie sinueuse.

Le second chapitre, loin d’être plus jovial, se concentre à déployer ce qui fait de notre monde moderne les conséquences du début des années quatre-vingt avec pour leitmotiv la Mondialisation et le libre cours des puissances monétaires, divisant la planète entre super riches et ultra pauvres.

Dès lors, qui sommes nous et vers où se dirige-t-on comme le prophétise indirectement Bruno Latour ? Les grands pontes se sont habillement mis à l’abri… quant au reste, la masse du grand nombre, œuvre sous une persécution de tous les instants à se quereller avec son prochain plus ou moins de même statut et de condition bancale.

D’ailleurs, les auteurs jonglent d’un chapitre à l’autre avec cette image de femme proche de l’apoplexie, se questionnant sur sa raison de vivre et le sentier qu’elle doit arpenter pour vivre un tant soit mieux. Un monde moderne aveuglant de chimères, destiné à capitaliser ses membres dans un carrousel qu’ils n’ont clairement pas sélectionné d’eux-mêmes.

Puis, on repart de plus belle se concentrant sur l’impact du globe qui se décompose de toutes parts, poussant nombreux à migrer ailleurs, dans l’espoir d’un avenir plus radieux. Bruno Latour pointe un système mondial irréversible à tous niveaux, dans lequel l’individu tel quel n’est plus rien, si ce n’est un pion malléable, remplaçable et définitivement ignoré.

Pour peu, on se croirait presque dans l’un des épisodes du Tueur de Matz & Jacamon, avec cette érosion du monologue à souhait, criblant de flèches sanguinaires la corruption d’un ordre mondial. Sauf qu’ici, à défaut d’un redresseur de tord, on navigue clairement dans des faits sombres de surcroit avec cette inquiétude qu’aucune issue ne correspond aux attentes de la plèbe. Si ce n’est de tout reprendre à zéro mais qui voudrait d’un silex pour se réchauffer ?!

La vision urbaine détaillée et soulignée dans Zone Critique se veut volontairement noirâtre et cristallisée d’un effet boomerang en pleine face. Certes, tout ceci est plus que connu. A force, cela frise le démodé ou l’Humain en perte de vitesse ne peut que se rallier à l’instant présent à défaut d’autre chose.

Bref, vous l’aurez sûrement compris : Zone critique ne s’adresse nullement aux dépressifs de nature bien qu’il détaille on ne peut plus avec un cran de justesse le monde contemporain dans lequel nous pataugeons clandestinement. S’agit-il pour autant d’un album intéressant ?

Sans nul doute. Bien qu’il pourrait s’adresser ouvertement à ceux et celles qui ignorent encore le résultat des années quatre-vingt, soit seulement quatre décennies en arrière à notre contexte actuel. Il n’apportera que peu aux connaisseurs économico-politiques qui révisent régulièrement l’Actualité mais pourrait en effet être bien utile à une nouvelle vague de lecteurs.

Quant au style graphique appuyé par Philippe Squarzoni, il peint une réalité telle qu’elle peut nous être transmise. Parfois minimaliste, mais porteur d’un message comme le témoignage ce roman graphique. Des images chocs qui montrent ce qui doit être dévoilé. Chacun pourra s’en faire une idée personnelle.

Coq de Combat

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