Œuvre Originale : Masaru Sato
Scénariste : Takashi Nagasaki
Dessinateur : Junji Ito
Editeur : Delcourt / Tonkam
Genre : Politique
Sortie : le 15 mars 2023
Avis de l’éditeur :
Celui qu’on appelle le Raspoutine du ministère des affaires étrangères a été arrêté par la brigade spéciale du ministère public de Tokyo. Pourquoi ce diplomate semble-t-il impliqué dans la rétrocession des îles du nord de Hokkaido par la Russie? Basé sur l’expérience personnelle de l’ancien diplomate Masaru Satô, ce récit présente son combat contre un procureur de la brigade spéciale au cours de ses interrogatoires quotidiens
Mon avis :
Coupable ou innocent ? Voici l’ancien diplomate Masaru Satô en bien mauvaise posture, interrogé sans cesse depuis des journées interminables par un « expert », le procureur de la brigade spéciale d’enquête.
Entre ces deux perfectionnistes notables, nous avons droit à un match de boxe de la parole édifiante, d’une offensive de type plaidoirie en huit clos, d’un panel gratiné en vocabulaire, d’un duel de géants. Chaque réponse donnée par Masaru peut déboucher sur une nouvelle intrigue, mêlant de grands despotes politiques, à l’image des trois politiciens, Toratarô Motohashi, Eizô Tabuchi & Toshiro Hori, impliqués de près ou de loin dans les magouilles politiques, qui retournent les médias, dévoilant les abus au grand jour.
D’un point de vue scénaristique, Takashi Nagasaki déploie un univers prenant, loin des codes traditionnels, où la trame évolue dans un registre sous la teneur « Questions / Réponses », à répétition sans pour autant basculer vers une redondance paresseuse. Certains flashbacks permettent au lecteur le temps d’un instant, de voyager, d’en saisir ses rouages et le fonctionnement de cet interrogatoire poussé à son paroxysme. Un résultat qui se veut purement jouissif, qui casse « le traditionnel » et le formate par des cracks de l’expression orale.
Ici, tout semble codifié à l’extrême. Chaque mot, même anodin, peut faire basculer la balance et le scénariste place deux ténors de la parole, qui se renvoient mutuellement la balle dans un duel pour lequel aucun ne présente de lacune.
Des espions au sein du gouvernement, des pots-de-vin pour soudoyer certains patrons, et des mensonges énormissimes dévoilés au grand jour, voici le menu proposé pour ce 3ème opus de Raspoutine le Patriote.
Quel bonheur également de pouvoir contempler le travail de Junji Itô dans un registre loin de son cheval de bataille. Comme quoi, le dessinateur excelle dans un segment diamétralement opposé à ces traditionnelles histoires horrifiques. Les magnas de l’économie et de la politique sont peints et décrits tels des mercenaires intellectuels, capables du meilleur comme du pire, et demeurent pour la majeure partie d’entre eux, leur propre ennemi.
Sur un ton cynique mais enroulé avec une certaine finesse, Junji Itô séduit par la simplicité qu’il fournit. Tout du long de ces quelques 220 pages, il privilégie des faciès en gros plan, jouant clairement sur les nuances d’expression de visage, sur leur étonnement, leur agacement, leur mimique et que cela sied idéalement avec la narration.
Un très bon titre à conseiller.
Coq de Combat
SambaBD 
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