Detroit Roma

Scénario et dessin : Elene USDIN et BONI
Editeur : SARBACANE
352 pages
Date de sortie : 5 novembre 2025
Genre : road(bd s)trip
Prix Wolinski de la BD du Point – Finaliste 2025

Deux filles, une route…
Detroit, 2015. À bord d’une vieille Ford Galaxy, deux jeunes filles traversent une Amérique en déclin, du Nord au Sud. Fuyant Detroit, leur ville natale, elles roulent jusqu’à Rome, en Géorgie, pâle copie de la cité antique. Un road-trip aussi mystérieux qu’imprégné de sens. Pour Becki, il s’agit de remonter la route des esclaves, ses ancêtres. Pour Summer, de rendre hommage aux racines italiennes de sa mère, Gloria. Sur la route, Becki gratte dans ses carnets de dessin déjà noircis par leur histoire, leurs drames quotidiens et leur amitié chaotique. Au fil des croquis, des kilomètres avalés et des confidences, les deux amies délieront les secrets de famille qui ont noué leur destin, bien avant leur naissance.

Ce roman graphique, imposant par son poids et sa taille, se veut un hymne déchirant à une Amérique en pleine décrépitude. Sa technique impressionne et sa narration, par son refus de la linéarité, ne s’autorise aucune simplicité. Chaque page devient tableau, chaque case devient cinéma. Elene Usdin avec ses gouaches chatoyantes, son usage des bics et ses crayons de couleur éclatants, alterne pleines pages colorées avec les dessins en noir et blanc croqués par Boni, en peuplant le récit de portraits authentiques d’Américains rencontrés durant le travail créatif. Cette partition visuelle, où la couleur côtoie le quasi-monochrome, où l’expressionnisme rencontre le documentaire brut, génère une tension esthétique. Les pages se superposent avec des citations cinématographiques cultes — fragments de David Lynch, scènes d’anthologie hollywoodiennes — qui ponctuent et infusent le récit.

Les auteurs entrelacent sans cesse le présent du voyage avec des moments de révélation et des flash-back douloureux qui, lentement, révèlent les fractures souterraines : la pauvreté du père de Becki, la solitude dorée de Summer enfermée dans la villa maternelle, la misère environnementale incarnée par le scandale de l’eau contaminée au plomb de Flint. Un voyage routier dont l’architecture narrative labyrinthique, où chaque souvenir redéfinit la perception du présent.

Ce détournement du langage cinématographique, les tableaux en couleur et les croquis épurés en noir et blanc créent la grammaire d’une véritable symphonie .

SKIPPY

Un commentaire sur “Detroit Roma

Ajouter un commentaire

Répondre à Samba Annuler la réponse.

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑