Spirou et la Gorgone bleue

Scénario : Yann
Dessin : Dany
Éditeur : Dupuis
88 pages
Date de sortie : 08 septembre 2023
Genre : Aventure

« Blody blue bitches ! Je dépenserai sans compter pour vous faire payer ça ! »

Présentation de l’éditeur

Lors d’un reportage sur un groupe « écolo-terroriste », Seccotine découvre que ses activités sont financées par le comte de Champignac, le vieil ami de Spirou et Fantasio ! En prenant le relais de l’enquête, le célèbre duo va se retrouver embarqué à son insu sur un porte-avions dans un combat acharné entre un milliardaire producteur d’engrais chimiques extrêmement polluants et une organisation 100 % féminine qui lutte avec des moyens originaux contre la malbouffe et la pollution des océans.

Avec La Gorgone Bleue, Yann et Dany nous livrent une grande aventure humoristique de Spirou qui n’hésite pas à aborder quelques thèmes d’actualité brûlants : écolo-terrorisme, pollution des océans, greenwashing, déontologie médiatique, etc.

Mon avis

J’avais déjà utilisé un tampon ‘Tout ça pour ça’ mais si ça continue, je vais m’en faire un ‘Woke Alert’… Parce que là, on est un peu en plein dedans… Attention, je le dis ici une fois pour toute, ce ne sont pas les combats des ‘woke’ qui me gênent, je partage la plupart des causes qu’ils défendent, qu’ils s’agisse de lutter contre le racisme, le machisme, la pollution, l’homophobie, etc., mais c’est bien la forme que prend généralement leurs combats qui me gave au plus haut point… peut-être encore plus que les Mc Burgy de cet album.

Mais revenons-y donc à cet album qui, effectivement, possède cet aspect aujourd’hui assez clivant de ‘woke’… Quelques exemples pour illustrer mon propos. D’abord, ceux qui luttent contre le trumpo-milliardaire qui pollue sans vergogne sont en fait uniquement « celles »… C’est une organisation exclusivement composée de femmes. Parce que les hommes, évidemment, entre autres innombrables tares, sont plus du côté des pollueurs que des défenseurs de la planète. D’ailleurs, celui qui pollue, est forcément un homme, blanc, blond de préférence… Ensuite, la commandante (forcément une femme) du porte-avion (USS Obama) est afro-américaine, tout comme son équipage. Ceci afin de dénoncer (et c’est très bien), dans une plus ou moins subtile inversion des rôles, le racisme quand le seul blanc du bateau est naturellement soupçonné d’espionnage. Et puis la pirouette finale qui fait complètement craquer Sécotine sur Kay Mac Cloud, l’agentE de la CIA… Comment dire…?

Alors, tout ça est bien gentil, et vraiment, même si j’ai l’impression d’argumenter comme un vieux con, ça ne me dérange pas une seconde… C’est juste que, comme un bon nombre d’œuvres grand public qui sortent aujourd’hui, j’ai la vague impression que l’on rajoute juste une couche de ‘wokisme’ (ou autre, appelez-ça comme vous voudrez) pour suivre le mouvement… Et ça, ça me dérange, oui… parce que si ça ne manque pas forcément de sincérité, ça manque clairement d’authenticité.

D’ailleurs, un certain nombre d’éléments viennent tempérer, et le mot est faible, ce côté woke… D’abord, les filles (divinement dessinée par Dany, de mon point de vue d’homme hétéro, hein…) sont toutes des bombasses (sauf la capitaine du porte-avion qui remplit à la fois le quota afro-américaine ET en surpoids). Par ailleurs, le scénario de Yann ne leur fait pas vraiment de cadeau et la plupart d’entre elles (les membres de la Gorgone Bleue notamment) sont globalement décrites comme des greluches sans trop de cervelle. Et je ne vous parle pas du commentaire de soldats du porte-avion comparant (par la négative, tout de même…) les activistes prises dans un filet de pêche à des thons… Ce qui, pour le coup, n’est vraiment pas une vanne très 2023… Je vous avoue que la présence de ces aspects à la fois ‘woke’ ET ‘boomer’ (je déteste ce terme ! désolé de l’utiliser ici) et très très déroutante.

Alors, oui, c’est magnifiquement dessiné, on a un scénario à rebondissement avec un twist final que l’on peut ne pas avoir deviné (le contraire est vrai également…), l’ultra capitalisme en prend pour son grade (notamment la partie greenwashing, sans doute la plus réussie de l’album), mais mon ressenti global reste plutôt négatif… Tant pis. Dany et Yann sont des auteurs que j’apprécie pour leur production généralement de très haute qualité… Mais là, de mon très humble point de vue, ça n’a pas plus marché que ça.

Odradek.