Dessin : Marc Jailloux
48 pages – cartonné
Editeur : Casterman
Sortie : 04 novembre 2015
Aventure – Historique
Présentation de l’éditeur :
Fils d’Adréa et d’Héraklios, derniers souverains de Sparte disparus dans des circonstances tragiques, le jeune Héraklion traverse une grave crise identitaire. Alix, son précepteur, semble impuissant devant ses fugues à répétition qui sonnent comme autant d’appels à l’aide. Après avoir découvert qu’Héraklion entretenait une correspondance avec Astyanax, Alix décide d’emmener le jeune orphelin en Numidie, où l’ancien général de la Garde noire de Sparte, devenu mercenaire, a pris la tête de la puissante armée du roi Juba Ier. Ce dernier, allié de Pompée, s’apprête à attaquer les troupes de César à Thapsus. En organisant une rencontre entre Héraklion et Astyanax, Alix espère provoquer un choc émotionnel chez l’adolescent, le réconcilier avec son passé, et lui permettre d’entrevoir la vie sous un nouveau jour. Après La Dernière conquête et Britannia, qui entraînaient leurs protagonistes respectivement en Bactriane et en Bretagne, Marc Jailloux et Mathieu Breda envoient à nouveau leurs héros vers des horizons lointains.
C’est cette fois la Numidie, théâtre des derniers affrontements sanglants de la guerre civile entre César et Pompée, qui sert de décor à une grande aventure humaine. Car dans Par-delà le Styx, les auteurs s’attaquent pour la première fois aux origines de la mythologie « alixienne ». Comme Alix, le jeune Héraklion est orphelin. Et comme lui, il est forcé de s’intégrer à une société nouvelle qui est, en partie, à l’origine de ses malheurs. Le tout à l’adolescence, un âge où les repères deviennent flous, et où l’instinct prime souvent sur l’acte réfléchi.
Comme pour mieux renforcer la dimension patrimoniale de ce nouvel album, Marc Jailloux et Mathieu Breda multiplient par ailleurs les références à certaines aventures d’Alix devenues mythiques. Ils remplissent ainsi certains vides laissés dans Le Dernier Spartiate, Le Dieu sauvage, ou encore Le Cheval de Troie. Et apportent, eux aussi, leur pierre à l’édifice patiemment bâti par Jacques Martin et ses collaborateurs depuis près de 70 ans.
Mon avis :
Le Styx, c’est le fleuve qui, dans la mythologie gréco-romaine, sépare les enfers du monde terrestre. Par-delà le Styx, titre de ce dernier album des aventures d’Alix, peut s’interpréter de diverses manières : ce fleuve infernal a été traversé il y a longtemps par un héros mort au combat, Heraklios, le père d’Heraklion, le jeune Spartiate rencontré par Alix qui est devenu son tuteur. L’ombre d’Heraklios plane sur le destin de son fils tourmenté. De Par-delà le Styx, nous parvient encore l’écho de la voix de Jacques Martin, l’un des maîtres de l’école de Bruxelles avec Hergé et Jacobs.
Le pari n’est pas évident : comment conserver l’héritage de Jacques Martin tout en insufflant un nouveau souffle à sa série-phare : Alix ? Comment satisfaire un public de lecteurs de trois générations différentes ? En opérant des choix. Evidemment, mais lesquels ?
Au niveau du scénario, on retrouve donc ici des personnages d’histoires précédentes : Le dernier spartiate, Le dieu sauvage et Le cheval de Troie, ce qui atteste d’une fidélité à la mythologie alixienne, pour reprendre la savoureuse expression que Marc Jailloux a utilisée lors de notre rencontre. Le cahier des charges a été respecté : une aventure personnelle pour Alix, un grand voyage, un contexte historique essentiel. De mon point de vue, il est indispensable de lire ou relire Le dernier spartiate pour apprécier toute la finesse du récit. Mathieu Bréda a construit son histoire autour de cet album et a rempli ainsi certains vides, comme en témoigne l’épisode de la construction de la Citadelle spartiate de la reine Adrea. C’est d’autant plus important que le prochain Alix senator évoquera le même sujet. Pour les fans de la série, le plaisir est certain. Pour ceux qui la découvrent, c’est un tout univers narratif complexe qui s’ouvre à eux et l’occasion de se plonger dans l’histoire antique. Avec Alix, le lecteur peut rencontrer de grandes figures : Marc-Antoine, Metellus Scipion, Caton, le mercenaire Publius Sittius. On finirait presque par regretter le nombre de 46 planches, la nostalgie des 54 ou 62 planches reste forte tellement les intrigues, les émotions et les aventures paraissent riches de potentialités.
Après un album d’Orion et deux d’Alix, le dessin de Marc Jailloux est bonne voie vers la maturité. Il repose sur une solide documentation ce qui donne une cohérence historique à la série. Pour cet opus, il a soigné en particulier les costumes militaires, la forme des épées et l’architecture. Regardez attentivement les cases ci-dessous qui mettent en valeur les ex-voto du temple d’Asclépios. Tout est reproduit d’après des vestiges archéologiques.
Marc Jailloux travaille sur du papier de format 35X67, il encre à la plume et à l’encre de Chine dans la plus pure tradition. Son implication dans la conception scénaristique est manifeste d’une étroite collaboration avec Mathieu Bréda. Le tout se fait sous la supervision de la fondation Martin qui lui fourni d’ailleurs ce fameux papier. Observez ci-dessous l’art subtil de la citation : un petit cheval de Troie proche de la main d’Enak figure à la devanture du sculpteur.
Quelques mots à propos de la couverture : ce premier projet a été abandonné jugé peu conforme au contenu, le côté onirico-fantastique n’ayant que peu de rapport avec le réalisme assumé par la série.
Le côté vintage de l’album et du dessin, les rebondissements de fin de page qui dynamisent le récit, les références à cette fameuse mythologie alixienne, le respect des exigeants codes martiniens, font de ce livre une réussite. Ce qui aura le mérite de concilier les attentes de plusieurs générations de lecteurs des aventures d’Alix.
Dessin
Scénario
Moyenne
Le site internet des Editions Casterman : ICI
Le blog de Marc Jailloux : ICI
Cette chronique a été rédigée suite à une rencontre avec Marc Jailloux dans les locaux des Editions Casterman le vendredi 06 novembre 2015.
Skippy











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