Dessin : Enki Bilal
Editeur : CASTERMAN
80 pages
Sortie le 29 octobre 2025
Genre : les néants du numérique
Quatrième volet du grand récit SF d’Enki Bilal
Alors que le grand Bug planétaire a rendu impossible l’accès aux données numériques, l’hypermnésique Kameron Obb est la proie de toutes les convoitises. Traqué à travers le monde par des instances gouvernementales autant que par des groupuscules contestataires, il réussit à communiquer avec sa fille, elle-même kidnappée par de mystérieux ravisseurs… Mais quelle est la véritable nature du Bug ? Est-ce seulement une catastrophe technologique ou bien la conséquence d’une véritable attaque contre l’humanité ?
Dans ce quatrième épisode, Obb, contaminé par le dédoublement du Bug, voit sa santé mentale défaillir : il semble qu’une entité, pareille à un dieu, prenne possession de son esprit…
Il y a quelque chose d’étrange et inquiétant à lire le quatrième tome de Bug en cette fin d’année 2025, alors que les débats polémiques sur l’intelligence artificielle occupent l’espace médiatique. Enki Bilal semble devenir le prophète des angoisses technologiques et continue d’orchestrer son univers. Avec une puissance évocatrice des images sans pareille. Un vertige visuel, une narration parfois hermétique.
Le Livre 4 marque un changement narratif. Le récit éclate et Kameron Obb, héros (malgré lui), n’est plus seulement le disque dur vivant de l’humanité, il devient maintenant l’enjeu d’une guerre civile métaphysique.

D’un point de vue graphique, Bilal atteint le sommet de son art. On dépasse la bande dessinée pour entrer dans l’univers des tableaux séquentiels avec ce trait crayonné, rehaussé de pastels gras et d’acrylique.
Sur le fond, l’intrigue passe du thriller d’anticipation à l’ésotérisme technologique. Là où le « Bug » initial n’était qu’un silence numérique, ce tome introduit une dimension plus insidieuse : l’intelligence artificielle. Bilal semble nous dire que le vide laissé par nos données ne restera pas vide longtemps.
Les allégories et les différentes factions (États, mafias, sectes) traquent un Obb de plus en plus amnésique et passif. On sent physiquement le poids d’un monde qui s’effondre dans une atmosphère, lourde et poisseuse.
Bilal prépare le terrain pour un final qui s’annonce apocalyptique. On a hâte de savoir si le cinquième et dernier livre parviendra à résoudre l’équation complexe qu’il a posée : comment l’humanité peut-elle se souvenir d’elle-même quand sa mémoire est devenue un virus ?

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