Géants aux Pieds d’Argile

Scénario : Mark McGuire et Alain Chevarier
Dessin : Alain Chevarier
Éditeur : Sarbacane
Date de sortie : 2 janvier 2025
272 pages
Genre : Tranche de vie

« Comment ça va à la maison? »

Présentation de l’éditeur

Pat et Mathieu sont deux jeunes pères, déterminés à ne pas répéter les erreurs de leurs propres parents : celles de toute une génération de mères au foyer dominées et de chefs de famille autoritaires, voire violents. Mais tandis que leurs compagnes respectives, plus accomplies et souvent absentes pour le travail, les laissent gérer seuls la maison et les enfants, ces quarantenaires se heurtent à leurs propres contradictions vis-à-vis de cet idéal de paternité moderne. Pour Pat, le poids est encore plus lourd à porter. Marqué par la séparation de ses parents et l’alcoolisme de son père détruit par la guerre du Vietnam, il est lui-même dévoré par une rage qu’il ne comprend pas.

Alors qu’il lutte pour offrir un avenir meilleur à ses enfants, il doit affronter ses démons intérieurs hérités de son histoire familiale, avant que cette noirceur ne les atteigne à leur tour.

Mon avis

L’aquarelle de la couverture, toute de verdure, ne doit pas te méprendre Ô Sambesque lecteur ! Le joli trait d’Alain Chevarier se matérialise dans un crayonné noir et blanc. Le dessinateur va à l’essentiel, propose des personnages parfois esquissés devant peu d’arrière-plans.

Mark McGuire a coécrit cette histoire avec Alain Chevarier. Une rapide recherche « sur l’internet » montre que celle-ci relève de l’auto-fiction. Les deux personnages masculins, Pat et Mathieu, tentent de déconstruire (explicitement) les stéréotypes familiaux habituels en prenant en main la gestions de leurs foyers respectifs en l’absence (et en présence) de leur épouse respective. Mais l’année sabbatique de Pat ne se passe pas comme prévu. Il s’agace, perd sa patience et son sang-froid et pointe du doigt les limites de ce « modèle » familial et de ses bonnes intentions à lui. Son mal-être l’envahit peu à peu, il se sent débordé et s’isole. Le récit interroge sur l’héritage filial, qu’il soit éducatif ou génétique. Pat pense que les blessures et les faiblesses de son père peuvent avoir une influence sur son comportement envers ses propres enfants. Ses recherches personnelles et familiales tournent à l’obsession…au détriment de sa vie de famille dans un cercle désespérément vicieux. Ces dernières se font d’ailleurs ressentir dans la lecture qui peut parfois s’étirer.

Mais sa quête introspective est admirablement retranscrite. L’album questionne sur le glissement sociétal de la structure familiale, sur le regard de l’homme sur sa place dans celle-ci. Sans troubler la compréhension de l’histoire, quelques expressions québecoises peuvent, au départ, perturber la fluidité de la lecture. Mais on s’y habitue vite et cela donne d’ailleurs un certain charme, une certaine authenticité à l’ensemble.

Reste la thématique abordée du poids de la guerre sur les anciens combattants. Les traumas passés perdurent, les individus ont été transformés par des traumas inavoués. Le traitement de ce sujet est d’une intimité des plus touchantes, la quête de vérité sur le passé de son père (et de sa mère) et sa vision de sa propre famille qui en découle l’est également.

Petitgolem