The Velvet Underground, dans l’effervescence de la Warhol Factory

Scénario : Koren Shadmi
Dessin et couleurs : Koren Shadmi
Éditeur : La Boite à Bulles
192 pages
Date de sortie :  février 2024
Genre : biographie

 

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« – ça pue cette histoire. Je sens qu’ils se servent juste de nous pour lancer la carrière de Nico. Une fois l’album sorti, ils vont nous lâcher. »

 

Présentation de l’éditeur

Issu de l’emblématique scène artistique du New York de la fin des années 60 et porté par l’esprit brillant et indompté de ses membres fondateurs, Lou Reed et John Cale, le Velvet Underground compte aujourd’hui parmi les légendes du rock… Mais il n’en a pas toujours été ainsi.

Nés sur les deux bords de l’Atlantique, l’un au Pays de Galles et l’autre à Long Island, John et Lou fuient des environnements familiaux nocifs, portés par une même soif de liberté. Réunis par un producteur cupide qui les abandonnera aux premiers remous, les deux marginaux entament une collaboration amicale et artistique qui bouleversera les codes de leur époque.

Mon avis

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le Velvet Underground ne fut pas une émanation de l’artiste Andy Warhol. En revanche, il est presque certain que sans le passage du groupe dans la Warhol Factory, personne n’en aurait jamais entendu parler. Musique trop expérimentale et décalée pour l’époque, textes crus et provocateurs fruits du cerveau d’artiste en rébellion contre tout et cherchant à choquer le public le plus possible, ont mis d’office le groupe à la marge. Selon Lou Reed, le fondateur, la mission du Velvet était d’exaspérer, de troubler et de déranger le public. Par une musique brute, abrasive, lancinante, et par un look vestimentaire noir accessoirisé d’objets empruntés au milieu SM. Paradoxe de Lou Reed qui voulait ne pas plaire, mais qui voulait aussi rencontrer le succès. Mais n’est-ce pas là le propre du Rock !

Le Velvet Underground est aujourd’hui considéré comme l’un des groupes de rock le plus influent, posant notamment les premières bases du punk rock qui déferla dans les années 70. Bowie, Iggy Pop, les Stooges, Les Ramones, mais aussi Talking Heads, Sonic Youth, Les Smashing Pumpkins, R.E.M. ou Nirvana, ont tous pris un peu du Velvet.

Koren Shadmi nous raconte l’histoire de ce groupe emblématique du rock, qui n’a jamais vraiment rencontré le succès durant sa période d’activité. Il commence son histoire par l’enterrement d’Andy Warhol. Personnage important dans l’histoire du groupe, mais pas central. Il évacue donc d’entrée la question Warhol (il sera quand même largement évoqué par la suite) pour centrer son récit sur les deux piliers fondateurs du groupe, Lou Reed et John Cale, et leur relation tumultueuse. Deux personnalités écorchées, abîmées dans leur jeunesse, fuyant un cadre familial oppressant et toxique. Les deux se rencontrent et se trouvent dans leur révolte intérieure commune et dans le refuge de la musique qui deviendra le véhicule et l’exutoire de leur colère.
De ce point de départ fait de galères et de misère (ils iront jusqu’à voler du bois pour se chauffer), à l’explosion du groupe quelques années plus tard, Koren Shadmi nous invite dans l’intimité du Velvet sans rien nous cacher. Les rapports entre les deux artistes sont plus que tendus, virant souvent au conflit ouvert, minant le groupe mais aussi nourrissant sa créativité. On y découvre un Lou Reed à l’égo démesuré, paranoïaque, jaloux, pétri de contradictions et odieux avec ses acolytes, particulièrement avec John Cale et la chanteuse Nico.

Koren Shadmi dépeint sans concessions les rapports humains qui règnent dans ce microcosme particulier animé par l’ambition et les jeux de pouvoir. Un milieu très violent psychologiquement, où les égos s’entrechoquent sans jamais pouvoir vraiment cohabiter.
L’auteur américain nous livre là une biographie passionnante qui nous montre la face cachée de la création artistique, nous invite à découvrir les affres délirantes du rock, tout en nous faisant prendre un peu de recul sur toutes ses icônes.

Loubrun